Les tiers-lieux, fabriques de territoire

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Rendons à César ce qui est à César : l’appellation « fabriques de territoire » n’est pas de nous, mais du gouvernement. Ce dernier mise beaucoup sur les tiers-lieux comme moteurs de redynamisation des territoires. A tel point qu’il a lancé un appel à projet pour financer 300 projets sur une durée de 3 ans !

Restez avec nous : on vous explique ce que sont les tiers-lieux, et pourquoi ils sont si bénéfiques pour les territoires dans lesquels ils s’installent.

Le petit lexique des tiers-lieux

Avant de commencer, voici une courte présentation des différents types de tiers-lieux, pour vous aider à vous y retrouver :

Dictionnaire ouvert
  • Atelier partagé

    Association qui permet à tout un chacun de venir pratiquer du bricolage ou des activités créatives, dans un lieu partagé et convivial.

  • Café-Wifi

    Historiquement, le lieu de travail de prédilection des travailleurs nomades. Il s’agit de simples cafés ou restaurants, avec un accès Wi-Fi. L’enseigne MacDonald’s a fait office de précurseur, mais ce concept s’est aujourd’hui généralisé à de nombreux établissements.

  • Campus connecté

    Lieux d’études à distance situés dans des zones éloignées des grands centres universitaires. Les formations sont proposées par des établissements d’études supérieures, et les étudiants bénéficient d’un tutorat.

  • EPN (Espace Public Numérique)

    Ce sont des lieux qui permettent à tout un chacun de découvrir et de s’approprier les nouveaux outils numériques. Ils proposent un accès à internet, mais aussi et surtout un accompagnement, parfois sous forme de médiation.

  • Espace de coworking

    Espaces de travail partagés payants, on peut y accéder en payant le tarif correspondant au temps souhaité (d’une heure à plusieurs mois en passant par la demi-journée, la journée, la semaine, etc).

  • Fablab

    Abréviation de « FABrication LABotary ». Il s’agit d’ateliers ouverts et collaboratifs servant à la création d’objets physiques. On y trouve des machines-outils permettant l’usinage de pièces, comme des machines à découpe, des fraiseuses, des machines à sérigraphie voir des imprimantes 3D.

  • Friche culturelle

    La petite sœur des squat artistiques. Les friches culturelles s’installent en place des anciennes zones industrielles, pour y créer des projets à visée culturelle. Anciens lieux de marginalité, elles ont aujourd’hui le vent en poupe comme facteurs de réappropriation urbaine.

  • Garage solidaire

    Il permet d’effectuer soi-même ses réparations automobiles en louant l’espace et ses équipements. On peut également y apprendre les rudiments de la mécanique automobile, ou encore bénéficier de services professionnels à moindre coût.

  • Hackerspace

    Egalement appelés « hacklab ». Ce sont des espaces, temporaires ou permanents, qui regroupent des passionnés autour d’un même thème. Les sujet sont abordés sous formes d’ateliers ou de conférences, et concernent des sujets liés au numérique.

  • Incubateur

    C’est une structure qui permet d’accompagner des profils entrepreneurs et créatifs. Ces porteurs de projet sont ainsi conseillés et aidés dans leurs premières années de création d’entreprise.

  • Living lab

    Laboratoire d’innovation qui a pour principe de placer l’utilisateur au centre du dispositif. Le but est de créer des outils et services innovants afin de répondre au mieux à ses problématiques.

  • Maison de service au public

    Nouveaux relais de service public dans les zones rurales. Ces structures regroupent un ensemble de services publics (numérique, santé, administratif, services postaux, etc).

  • Makerspace

    Sorte de hub créatif, il regroupe les savoirs-faire d’artisans, de professionnels du numérique et d’artistes.

  • Micro-Folie

    Il s’agit d’un dispositif de musée numérique. Des œuvres ou expositions de grands musées nationaux sont entièrement numérisées, afin de créer des visites en réalité virtuelle. Ces œuvres deviennent alors accessibles depuis les Micro-Folies, qui peuvent être implantées n’importe où sur le territoire.

Aux origines des fabriques de territoire

Outils divers

En Janvier 2018, le ministère de la cohésion des territoires confie une mission au président de la fondation « Travailler autrement », afin d’étudier les liens entre numérique et territoires. Patrick Levy-Waitz rend son rapport 9 mois plus tard, dans lequel il répertorie près de 1800 tiers-lieux déjà existants sur le territoire.

Il met en lumière des données intéressants : 46% des ces tiers-lieux se situent en dehors des métropoles, et ils se déploient à travers de nouvelles façons de travailler (télétravail, travail collaboratif, etc). Surtout, il montre le caractère structurant de ces tiers-lieux pour les territoires. Ces derniers sont généralement portés par des acteurs locaux très motivés qui souhaitent insuffler de nouvelles dynamiques là où ils résident. Enfin, il note que ces projets s’inscrivent généralement dans des dynamiques de transition numérique et écologique.

La mission éditrice du rapport est intitulée « coworking : faire ensemble pour mieux vivre ensemble ». Loin d’un simple état des lieux, elle rend également ses recommandations, dont la principale : l’Etat doit accompagner le développement des tiers-lieux. Et il doit le faire en tant qu’accompagnant, pas de prescripteur, afin de laisser la créativité et les idées fleurirent en toute liberté… Un beau projet, qui ne restera pas lettre morte !

En effet, le ministère lance à l’été 2019 son AMI (Appel à Manifestation d’Intérêt), afin d’identifier et de soutenir 300 projets de tiers-lieux sur 3 ans. Un financement loin d’être anecdotique : les candidats retenus se voient ainsi attribuer des aides allant pouvant aller jusqu’à 50000€ par an ! Mais attention, tous les tiers-lieux ne sont pas concernés : la localisation et la taille de la structure sont ainsi pris en compte, pour qu’un tiers-lieu puisse être considéré comme une véritable « fabrique de territoire ».

Quand l’État investit dans les tiers-lieux

Origami de bateau avec un billet

Un accompagnement sur-mesure

Au-delà du seul investissement financier, le rapport préconise en tout 28 mesures pour accompagner et encourager la création de tiers-lieux. En priorité, l’État est ainsi invité à créer un « conseil national des tiers-lieux » afin de porter les actions de soutien. Il est également conseillé de favoriser la coordination public-privé, et de professionnaliser le métier d’ « animateur des tiers-lieux ».

Pour le domaine public, l’enjeu est de ne pas décrocher du train des jeunes générations qui, toujours selon Patrick Levy-Swaitz, seront celles du « faire ensemble ». Il s’agit d’une transition importante pour nos services étatiques, plutôt habitués à définir eux-mêmes le périmètre des projets, à définir des cadres dans lesquels il faut rentrer. Alors que dans l’accompagnement des tiers-lieux ne peut fonctionner qu’en misant sur la confiance, sous peine de faire immédiatement fuir les porteurs de projet.

Le cahier des charges des « fabriques de territoire »

Cependant, s’agissant d’argent public, il reste nécessaire de remplir certaines conditions. En réalité, tous les tiers-lieux ne peuvent se prévaloir du titre de « fabrique de territoire ». A la lecture du cahier des charges, on peut lire que « Les Fabriques de Territoire sont des tiers-lieux structurants capables d’augmenter la capacité d’action des autres tiers-lieux du territoire dans lequel ils s’inscrivent. »

Une fabrique de territoire, ce serait donc une sorte de « super-tiers-lieux », une matrice centrale capable de soutenir une multitude de petits projets. Compte tenu des difficultés plus grandes rencontrées par certains territoires, les centres-villes urbains sont exclus du dispositif. Ce dernier concerne en effet exclusivement les quartiers prioritaires des villes, et les zones rurales.

La pierre angulaire de ces fabriques de territoire : la formation et la montée en compétences numériques. Un tiers-lieu souhaitant obtenir le label doit donc diffuser, voir produire, en partie gratuitement des contenus d’apprentissage liés au numérique. Par ailleurs, il doit pouvoir disposer de moyens importants et être ouvert à des « partenariats d’ambition », afin de constituer de véritables ressources territoriales.

Quelques exemples inspirants

Pour finir le voyage, voici 3 exemples de tiers-lieux inspirants. En effet, quoi de mieux que des exemples concrets pour laisser libre court à son imagination et entrevoir ce qui est possible ? Et puis, à notre époque comme à n’importe quelle autre, nous avons bien besoin de rêve et de création…

Le garage moderne de Bordeaux (33)

Logo du "Garage moderne"
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Des 3 exemples choisis, c’est le seul qui ne fait pas partie des 30 premiers tiers-lieux choisis comme fabriques de territoire. Sans doute de par sa situation géographique, dans un grand centre urbain et dans une zone qui ne fait pas partie des quartiers prioritaires. Ou peut-être n’ont-ils tout simplement pas participé à l’AMI ? Après tout, avec leurs 20 ans d’existence au compteur, l’association est fermement implantée dans le territoire bordelais…

Alors, qu’est-ce-que le garage moderne ? Cette association est à classer dans la catégorie des « garages solidaires », mais pas seulement. De prime abord, on y trouve les services classiques d’un mécanicien automobile : faire réparer sa voiture, à un coût très avantageux. Comme toute association, il faut devenir adhérent pour profiter de ces avantages, moyennant une cotisation annuelle.

En tant que garage associatif, le garage moderne vous propose de participer vous-même à la réparation de votre voiture (ce qui fait baisser le prix de la main-d’œuvre), tout en étant accompagné par des mécaniciens professionnels.

Mais l’association va bien plus loin : atelier vélo, cantine gastronomique, soirées culturelles, concerts, événements, expositions… Un véritable carrefour culturel, dans des bâtiments emblématiques de l’âge d’or de l’industrie automobile et aéronautique !

Lacaze aux Sottises, à Orion (64)

Logo de "Lacaze aux Sottises"
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Lacaze aux Sottises, ce sont trois axes réunis au sein d’une même association : le spectacle vivant, le développement durable et l’éducation populaire. Un véritable « agitateur de curiosité », comme ils aiment à se définir eux-mêmes !

Le premier aspect se décline à travers un projet itinérant d’organisation d’événements festifs en milieu rural. Le but est d’aller au plus près des habitants du territoire, et de leur amener une programmation variée de représentations artistiques.

Côté développement durable, la Maison Lacaze, située à Orion, se compose d’un ancien corps de ferme, transformé en lieu d’apprentissage et d’expérimentation agricole. Avec un accent particulier mis sur les grandes problématiques de l’écologie : gestion des déchets, de l’énergie, de l’eau.

Grâce à l’existence de ce lieu, l’association reçoit petits et grands autour d’ateliers et d’animations dans une « démarche de pédagogie active ». l’idée étant de transmettre, tout en rendant les personnes elles-mêmes actrices de leur apprentissage.

Le Fablab des 3 lapins, Luxeuil-les-Bains (70)

Logo du "Fablab des 3 lapins"
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Et voici le dernier de notre série de tiers-lieux inspirants ! Bon ok, on l’a un peu choisi pour son nom… Il faut dire que c’est original non ?

Alors qu’est-ce donc que ce Fablab des 3 lapins ? Vu le nom, on sait déjà dans quelle catégorie de tiers-lieu le classer… Cet espace innovant se veut non seulement comme un atelier partagé mettant à disposition du matériel de pointe, mais il a également d’autres fonctions. Notamment celles d’être un lieu d’apprentissage, et de soutien aux porteurs de projet.

Ainsi, aux 3 lapins, si vous construisez un objet innovant, vous êtes également encouragé à produire le tutoriel permettant à d’autres d’en faire de même ! Les tutoriels sont ensuite mis en ligne sur le blog du Fablab, à l’image de ce guide pour fabriquer votre lombricomposteur en bois.

Le Fablab des 3 lapins propose également des formations pour apprendre à se servir des derniers outils du numérique, des « Répar’ café » où on peut amener n’importe quel objet à réparer, ou encore des soutiens aux lancements de projet. Bref, une véritable plateforme de la création et du bricolage, qui leur a permis d’être reconnue comme structure de référence pour le développement numérique en zone fragile !


Pour vivre, les tiers-lieux s’appuient avant tout sur leurs utilisateurs : une communauté active de profils variés. Et vous, n’avez-vous pas envie de laisser s’exprimer votre fibre créative ? De rencontrer des professionnels et des artistes de tout horizon ? De vous investir dans un projet de société du « faire ensemble » ? Renseignez-vous : il existe peut-être un tiers-lieu prêt de chez vous !

Sources :
La page de la mission « coworking : faire ensemble pour mieux vivre ensemble » sur le site de la fondation « Travailler autrement »
Le lexique des lieux sur le portail de la médiation numérique
La page dédiée aux tiers-lieux sur le site de la mission gouvernementale « Société Numérique »
La page dédiée aux tiers-lieux sur le site du ministère de la cohésion des territoires

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